Toute construction requiert normalement une autorisation délivrée par les services d’urbanisme. Une telle autorisation peut toujours être contestée devant le juge administratif, mais les délais de traitement peuvent engendrer des situations où au moment de l’annulation, la construction illégale est déjà édifiée et susceptible de générer des troubles.
Dans un arrêt du 24 juillet 2019, le Conseil d’Etat a dû se pencher sur l’indemnisation des voisins d’une construction illégale, autorisée par les autorités compétentes.
En l’espèce, un permis de construire a été délivré par le préfet d’un département pour restructuration et réhabilitation de logements, et constructions supplémentaires, permis ensuite annulé par la Cour administrative d’appel pour excès de pouvoir. Le maire de la commune concernée par le projet délivre un permis de régularisation, à nouveau attaqué et annulé par le tribunal administratif. Les travaux sont pourtant réalisés au moment de l’annulation du permis, et les propriétaires d’un fonds voisins saisissent le juge administratif pour le préjudice causé par l’autorisation illégale, en demandant une condamnation solidaire de la commune et de l’Etat.
En appui à leur demande, les propriétaires font valoir la perte de valeur vénale de leur bien, en plus de nuisances sonores causées par les allées et venues de véhicules sous le porche et dans l'étroite voie d'accès des constructions édifiées en vertu des permis illégaux.
Leur recours est rejeté en première et seconde instance. La Cour administrative d’appel retient, que les demandeurs ne peuvent fonder leur demande en indemnisation pour perte de valeur vénale, au motif qu’ils ne font pas état d’un projet de vente de leur bien, ni qu’il existe un lien de causalité entre cette perte de valeur et les nuisances sonores constatées.
Saisies du pourvoi, les cinquième et sixième chambres réunies du Conseil d’Etat, décident que les demandeurs sont fondés à demander réparation de leur préjudice immobilier, annulent la décision rendue par la Cour administrative d’appel, et condamnent l’Etat et la commune au versement des dépens.
Dans son arrêt, la Haute Juridiction étend le droit d’indemnisation aux tiers concernés par un permis de construire illégal en précisant trois points essentiels.
Premièrement, les tiers peuvent rechercher la responsabilité de la personne publique qui a autorisé la construction illégale.
Dans un second temps, et sous réserve de régularisation du permis de construire, ils peuvent obtenir réparation de tous les préjudices qui trouvent leurs sources dans les illégalités entachant la décision.
Enfin, les tiers n’ont pas à faire valoir spécifiquement un projet de vente du bien immobilier concerné, pour justifier le préjudice fondé sur la perte de valeur vénale.
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Référence de l’arrêt : Conseil d’État 24 juillet 2019 n°417915